La contestation du salarié en matière d'Accident du Travail / Maladie Professionnelle
En matière de droit commun, la victime a le choix de régler son litige dans un cadre amiable ou par le contentieux judiciaire. Force est de constater qu’en matière de désaccord inhérent à la maladie professionnelle et à l'accident du travail, le salarié est exposé à de multiples situations selon le type de contestation. Il faudrait au salarié des qualités d'expert pour s'y retrouver !
- Si le contentieux est d’ordre médical, il doit solliciter une expertise, c’est l’expertise sécurité sociale.
- Si le contentieux est relatif à un taux d’incapacité ou porte sur le taux d’invalidité, il doit saisir le Tribunal du Contentieux de l’Incapacité.
- Si son désaccord est administratif, ou porte sur le caractère professionnel du dommage corporel, il doit obligatoirement saisir la commission de recours amiable (CRA) , laquelle prendra un avis conforme à celui de la CPAM. Puis il aura à saisir le Tribunal des affaires de sécurité sociale s’il n’est pas satisfait.
Quand on connaît les délais de saisine et d’instruction, sans parler des délais de prescription (2 ans en général), le salarié ne verra sa situation clarifiée qu’à l’issue d’une attente de trois ans au moins. Il ne pourra solliciter auprès du juge du TASS aucune provision, tant en matière de maladie professionnelle qu’en en cas de contestation du caractère professionnel de l’accident du travail !
En résumé, on aurait pu envisager, s’agissant d’un salarié victime, que le règlement du contentieux « maladies professionnelles et accident du travail » serait à la portée de tout justiciable. Il n'en est rien.
L’application de la réparation forfaitaire selon des dispositions de l’article L.411-1 du code de la sécurité sociale
En droit commun, il appartient à la victime (et rien qu’à elle), de rapporter la preuve de l’accident, du dommage et du lien de causalité entre le dommage et de l’accident.
En matière d'Accidents du Travail/Maladies professionnelles la victime doit uniquement rapporter la preuve que l’accident ou la maladie professionnelle a pris naissance du fait ou à l’occasion du travail. Le législateur dans sa grande générosité a pris en compte les difficultés d’administration de preuve (Qui doit prouver ? / Que doit-il prouver ?) incombant au salarié, qui, du fait de la relation de travail, ne se trouve pas placé sur un même pied d’égalité avec l’employeur. En d'autres termes, il suffira que l'accident ou la maladie aient pris naissance sur le lieu de travail ou à l'occasion du travail pour leur attribuer le bénéfice des dispositions de la législation du travail.
On a vu toutefois que lorsque la maladie professionnelle est hors tableaux ou à l’inverse lorsqu’elle prévoit une liste limitative de conditions, la preuve du caractère professionnel semble aléatoire. Car la preuve de l’exposition au risque s’apprécie « in concreto ». Le C2RMP ne voit pas toujours cette exposition puisqu’il statue sur pièces. Ces pièces sont fournies le plus souvent par la caisse. Cette absence d'écoute de la victime compromet l'appréciation concrète de la situation effective de travail du salarié.
Par extension on appliquera le régime protecteur des accidents du travail lorsque le salarié est amené à se déplacer entre son domicile et son lieu de travail ou son lieu de restauration. Ce type d’accident du travail est qualifié d’accident de trajet. C'est un accident du travail pour la sécurité sociale27 mais pas pour le code du travail !
En conséquence, le salarié bénéficiera d’une indemnisation forfaitaire alors qu’il ne se trouve pas sous la subordination de l’employeur puisque son contrat de travail est suspendu28. En effet, il n'est pas sur son lieu de travail et il ne s'est pas déplacé à l'occasion de son travail. Il ne bénéficiera donc pas de la législation relative aux accidentés du travail par le code du travail, tel que le doublement de l’indemnité de licenciement et le paiement automatique du préavis.
On verra que le salarié victime d’un accident de trajet bénéficie du cumul de législation sur les Accidents du Travail/Maladies professionnelles et la loi du 5 juillet 1985.
Une première lecture à ce stade de notre raisonnement démontre qu’en matière de législation sociale, il existe une inégalité de fait entre l’accident du travail et la maladie professionnelle outre la complexité des démarches d’expertise.
On a vu que cette inégalité vise principalement les maladies professionnelles hors tableaux ou, les maladies professionnelles avec conditions limitatives lorsqu’elles figurent aux tableaux.
Une réparation automatique et autonome
Il y a réparation automatique lorsque le fait dommageable résulte de la définition de l’accident du travail, de l’accident de trajet et de la maladie professionnelle.
Le salarié victime d’un Accidents du Travail/Maladies professionnelles bénéficie pendant la durée de ses soins et/ou de son arrêt de travail de prestations temporaires, puis, après consolidation, de prestations permanentes.
On peut résumer de la manière suivante les dépenses prises en compte par la sécurité sociale et figurant dans le code y afférant :
- Dépenses de santé actuelles et futures, articles L.431-1, 1° et L.432-4
- Dépenses de déplacement, article L.442-8
- Dépenses d’expertises techniques, article L.442-8
- Dépenses d’appareillages actuelles et futures, articles L.431-1, 1° et L.432-5
- Incapacités temporaires et permanentes, articles L.431-1, L.433-1, L434-2 et L.4315
- Perte de gains professionnels actuelles et futurs, articles L .433-1 et L.434-2
- Assistance tierce personne après consolidation, article L.434-2
Notons que la rééducation professionnelle et le reclassement sont pris en charge.
Une lecture rapide des articles du code de la sécurité sociale sur le contenu de la réparation automatique laisserait penser que, tout compte fait, le salarié se trouve dans une position avantageuse. Ce n'est pas le cas.
Lire la suite de cet article : Partie IV : Des différences de traitements indemnitaires criantes en matière d'accident du travail et de maladie professionnelle
SOMMAIRE DE L'ARTICLE :
Partie I : La rupture d'égalité en matière de réparation du dommage corporel entre victime salariée et victime de droit commun
Partie II : L’originalité de la réparation du préjudice corporel d’un accidenté du travail
Partie III : Contentieux et Indemnisation forfaitaire de l'accident du travail et de la maladie professionnelle
Partie IV : Des différences de traitements indemnitaires criantes en matière d'accident du travail et de maladie professionnelle
Partie V : Une indemnisation complémentaire possible en matière d'accident du travail depuis Juin 2010
Partie VI : Les incohérences du système d'indemnisation
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