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L’indemnisation de la perte de gains professionnels actuels et futurs

Indemnisation perte de gain professionnel

La nomenclature DINTILHAC prévoit que ce poste de préjudice professionnel a pour objet d’indemniser :
« Les pertes de gains liées à l’incapacité de travail, à la réparation exclusive du préjudice patrimonial temporaire subi par la victime du fait de l’accident, c’est à dire aux pertes actuelles de revenus éprouvées par cette victime du fait de son dommage. »

Ce poste vise donc à compenser les effets de l’invalidité temporaire que le dommage a occasionné dans la vie professionnelle de la victime jusqu’à la date de la consolidation.
En pratique, ce poste prend une place essentielle dans le processus d’indemnisation de la victime puisqu’en général, la victime d’un dommage corporel se verra pratiquement dans tous les cas privés de ses revenus professionnels en raison de ses séquelles. Ces revenus, essentiels au quotidien pour la victime et sa famille, devront être indemnisés afin que la victime soit replacée dans les conditions antérieures au fait dommageable.
Selon les séquelles que la victime présentera, il s’agira d’une perte de gains qui sera totale ou partielle.
L’évaluation de la perte de gains ne sera peut-être pas égale au montant qui reviendra finalement à la victime selon qu’elle aura ou non été indemnisée par un tiers payeur (organisme social, mutuelle prévoyance souscrite par l’employeur ou autre garantie contractuelle souscrite par la victime elle-même par exemple dans le cadre d’une garantie accident de la vie).
En tout état de cause, l’évaluation de la perte de gains professionnels doit être appréhendée in concreto. La nécessité de démontrer la réalité de ce préjudice est donc primordiale.

À lire : L'indemnisation du préjudice professionnel et économique.

L’indemnisation de la perte de gains professionnels de la victime dans l’emploi au moment du fait dommageable

L’indemnisation de la perte de gains professionnels actuels

Avant la loi du 21 décembre 2006, ce préjudice faisait l’objet d’une indemnisation sous l’appellation ITT « incapacité temporaire de travail ».
L’inconvénient demeurait dans le fait que la notion recouvrait en réalité bien plus que l’incapacité professionnelle puisqu’elle incluait également l’incapacité fonctionnelle.
Il en résultait une profonde confusion puisque quand certaines juridictions indemnisaient un aspect du préjudice (par exemple seulement le préjudice économique), d’autres tenaient compte à la fois de l’aspect économique et personnel de ce poste de préjudice. Cela conduisait à une différence de traitement que la nomenclature DINTILHAC a permis de palier.
L’appréciation médico-légale de ce préjudice est déterminante ; le rôle de l’Expert aura son importance dans la mesure où celui-ci devra déterminer si l’arrêt de travail présenté par la victime est imputable au fait dommageable.
Ainsi qu’il l’a été évoqué, la preuve de la perte de gains doit être soigneusement documentée afin que la perte subie par la victime du fait de son incapacité temporaire ou définitive soit réparée au plus juste.
Le plus généralement, la perte de gains professionnels actuels ne pose pas de difficulté dès lorsque la victime était en emploi au moment de son accident.
Dans l’incapacité d’exercer son métier, la victime devra calculer la perte qu’elle subit en raison du fait dommageable en tenant compte des revenus (salaire et autres avantages telles que primes) qu’elle aurait dû percevoir sans le fait dommageable déduction faite des prestations qui lui auront été servies par les tiers payeurs au titre du dommage.
A cet égard, la jurisprudence est venue rappeler que l’existence du préjudice de la victime ne pouvait être déduit du versement de la rente servie par l’organisme social au titre d’un accident du travail. La perte de gains doit être déterminée dans son existence et son quantum avant déduction.

Pourquoi est-ce important ?

Cela démontre l’importance de chiffrer et justifier la perte exacte subie par la victime sans se contenter de produire le justificatif des versements effectués par l’organisme social.
Dans le cas où la victime exerçait une activité professionnelle régulière, continue non salariée la perte de gains en tenant compte du bilan comptable (généralement les trois dernières années) pour découvrir le prorata du chiffre d’affaire non réalisé, déduction faite des charges variables.

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L’indemnisation de la perte de gains professionnels futurs de la victime

La résolution n°75-7 a inspiré le groupe de travail ayant élaboré la nomenclature DINTILHAC. Celle-ci prévoit que « L’évaluation du gain manqué doit être faite aussi bien pour la période antérieure au jugement que pour le futur. A cette fin, il doit être tenu compte de tous les éléments connus ou prévisibles, notamment du degré de l’incapacité, du genre d’activité déployée par la victime, de ses revenus après l’accident comparés à ceux qu’elle aurait obtenus si le fait dommageable ne s’était pas produit, ainsi que de la durée probable de ses activités professionnelles et de sa vie. »

Ainsi, la nomenclature prévoit que « Il s’agit ici d’indemniser la victime de la perte ou de la diminution de ses revenus consécutive à l’incapacité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du dommage. Il s’agit d’indemniser une invalidité spécifique partielle ou totale qui entraîne une perte ou une diminution directe de ses revenus professionnels futurs à compter de la date de consolidation. Cette perte ou diminution des gains professionnels peut provenir soit de la perte de son emploi par la victime, soit de l’obligation pour celle-ci d’exercer un emploi à temps partiel à la suite du dommage consolidé. Ce poste n’englobe pas les frais de reclassement professionnel, de formation ou de changement de poste qui ne sont que des conséquences indirectes du dommage. »

L’appréciation médico-légale sera déterminante dès lors que l’expert devra évaluer si l’incapacité de la victime est définitive de la victime est totale ou partielle. Cette appréciation doit se faire au jour de la consolidation. De cela, découleront deux constats possibles :

  • Soit la victime présente une incapacité de travail totale qui l’empêche de reprendre l’exercice du métier qu’elle exerçait avant le fait dommageable mais également à tout autre métier ;
  • Soit la victime présente une incapacité de travail partielle, c’est-à-dire qu’elle est dans l’impossibilité de reprendre le métier qui était le sien avant le fait dommageable mais elle peut tout à fait exercer un autre métier, qui serait le plus souvent adapté à ses séquelles et les contraintes qui sont désormais les siennes.

En tout état de cause, ces aspects de l’incapacité professionnelle sont sources de décisions jurisprudentielles foisonnantes.

L’indemnisation de la perte de gains professionnels futurs de la victime qui subit une incapacité totale de travail

Lorsque la victime se retrouve dans l’incapacité d’exercer une quelconque profession. Elle se voit licenciée pour inaptitude par son employeur à la suite d’examen médicaux réalisées par la Médecine du travail qui justifie alors le licenciement pour cause d’inaptitude au poste.

Après des tentatives de reclassement qui doivent être tentées par l’employeur dans tous les cas, la victime se voit donc sans emploi et donc sans revenu.
L’indemnisation de ce poste de préjudice est donc essentielle pour permettre à la victime d’être replacée dans la même situation qu’avant le fait dommageable.

L’indemnisation de la perte de gains professionnels futurs de la victime qui subit une inaptitude partielle de travail

La victime qui présente une incapacité professionnelle partielle sera donc dans l’impossibilité de reprendre son ancien poste de travail. Cependant, ses capacités physiques lui permettront soit d’occuper un poste adapté à ses séquelles (aménagement de poste) soit d’entreprendre une formation professionnelle qui lui permettra d’obtenir un poste ne nécessitant pas d’adaptation du poste.

En tout état de cause, en principe la perte de gains dans le futur ne sera pas totale puisque la victime disposera toujours d’une capacité de subvenir à ses besoins.
Néanmoins, une évolution jurisprudentielle permet de constater que l’appréciation de la capacité professionnelle de la victime s’effectue non pas de manière abstraite mais très concrète, c’est-à-dire que le Juge se place à la date de la demande d’indemnisation.
De ce fait, si la victime n’a pas, au jour de la décision, réussi à se reconvertir, entreprendre une formation professionnelle ou encore retrouvé tout simplement un poste adapté à ses séquelles, la jurisprudence peut considérer que sa perte de gains est totale malgré ses capacités physiques à retrouver un emploi.
C’est ainsi que la Cour de Cassation a eu l’occasion de rappeler que le poste de perte de gains professionnels futurs doit s'apprécier dès lors que l'accident rend la victime définitivement inapte à reprendre l'emploi précédemment exercé.
En l’espèce, la victime d’un accident de la circulation, avait subi un arrêt de travail durant plus d’un an. L’expert avait estimé qu’elle n’était pas inapte à exercer toute profession. Suivant ces indications, les juges du fond en avaient donc déduit que seule cette période devait être indemnisée au titre de l’accident dès lors qu’il n’existait aucune contre-indication à la reprise d’une activité professionnelle.
La Cour de Cassation a donc cassé l’arrêt rendu par la Cour d’appel en soulignant que la décision ne devait pas reposer sur la recherche ou non d’un nouvel emploi.
Ce principe est très régulièrement rappelé.
Il apparaît ici évident que seul le lien de causalité entre l’absence de reprise du travail et les conséquences de l’accident doit retenir l’attention des juges afin de déterminer si la victime ouvre droit à l’indemnisation de son préjudice né de la perte de gains professionnels futurs.
La jurisprudence va même plus loin lorsqu’elle juge que lorsque l’inaptitude, consécutive à l’accident, est à l’origine d’un licenciement, la victime n’a pas à justifier de la recherche d’un emploi compatible avec les préconisations de l’expert.
Il est à noter qu’en pratique et afin de convaincre les juges, la victime devra par ailleurs démontrer que malgré une capacité physique son profil professionnel lui laisse peu de chance de retrouver un emploi adapté à ses séquelles. L’âge, les compétences professionnelles, les diplômes sont autant d’éléments qui détermineront la décision de la juridiction.
Lorsque la victime sera parvenue, malgré son incapacité partielle, a retrouvé un emploi, il conviendra alors de vérifier que son emploi lui procure les mêmes revenus que ceux qu’elle percevait avant le fait dommageable. Dans le cas contraire, la victime sera légitime à solliciter la différence de revenus qu’elle subit.

Dans un arrêt du 18 janvier 2018, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel qui avait permis l’indemnisation des pertes de gains professionnels futurs d’une victime du fait d’une perte de chance de travailler à temps plein dans l’avenir en estimant qu’« en se déterminant ainsi, alors qu’elle avait constaté que Mme Z… occupait déjà un emploi à temps partiel avant l’accident, sans rechercher si elle avait subi une diminution de salaire consécutive à l’incapacité permanente à laquelle elle était confrontée dans sa sphère professionnelle à la suite du dommage, la cour d’appel a privé sa décision de base légale  ».
Lorsque la victime n’aura pas souhaité être reclassée à la suite de la constatation de son incapacité partielle, elle pourra également solliciter l’indemnisation du préjudice découlant de la perte de son emploi.
En effet, la jurisprudence pose classiquement que l’auteur d’un fait dommageable est tenu d’en réparer toutes les conséquences sans que l’on puisse exiger de la victime qu’elle limite son préjudice.
Ainsi, dans un arrêt récent une victime d'accident de la route est déclarée inapte par la médecine du travail au poste qu'elle occupait avant l'accident. Elle refuse par la suite les postes proposés par son employeur dans le cadre de la procédure de reclassement raison pour laquelle elle est licenciée pour inaptitude.
Elle sollicite à cette occasion notamment l'indemnisation de sa perte de gains professionnels futurs.
La Cour d'appel de Paris, saisie de cette affaire, accueille favorablement le principe de l'indemnisation de la perte de gains professionnels futurs de la victime, raison du pourvoi de l'assureur.
La compagnie d'assurance fonde son pourvoi sur le terrain de la causalité : ce préjudice ne serait non pas imputable à l'accident mais au choix de la victime de refuser le reclassement proposé par son employeur, refus considéré sans motif légitime. Il n'y aurait, selon la compagnie, aucun lien de cause à effet direct entre le préjudice allégué et l'accident dans la mesure où le préjudice serait le fruit d'une décision de la victime.
Confirmant une jurisprudence constante la Cour de cassation rejette ce pourvoi rappelant que la victime n'a pas pour obligation de minimiser son préjudice au profit du responsable et de son assureur.

 

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