JMP - Avocat

Téléphone icône facebook icône contact icône login

Loi Badinter et article 4 : conducteurs victimes d'accidents corporels

Le statut moins protégé de la victime conductrice

Loi Badinter conducteur victime accident

C'est l'une des critiques principales adressée à la loi Badinter : la victime conductrice, même si elle est la première victime des accidents de circulation, est par nature moins bien protégée par la loi (que ne le sont le passager, le piéton ou le cycliste accidenté...) du fait qu'elle est considérée comme « participant au risque de la circulation ». Elle est ainsi envisagée spontanément comme « auteur des dommages » jusqu'à preuve du contraire … Pour s'en convaincre, ces trois articles sont on ne peut plus clairs :

  • Article 3, loi 5 juillet 1985 : « Les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées […] sans que puisse leur être opposée leur propre faute… ».
  • Article 4 : « La faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis. »
  • Article R. 211–8C assur. : « L'obligation d'assurance ne s'applique pas à la réparation des dommages subis par la personne conduisant le véhicule.»

On comprend au travers ces dispositions que la loi Badinter de 1985 ne vise pas à améliorer le sort des conducteurs qui se révèlent être la catégorie délaissée par la réforme de 1985, tant au niveau de la responsabilité qu'à celui de l'assurance. Il en ressort que l'indemnisation du conducteur victime différera du tout au tout suivant qu'il soit victime de lui-même ou victime d'un choc avec un autre véhicule.

À lire : Qu'est-ce que la loi Badinter ?

Le cas où le conducteur est victime de lui-même

Un conducteur de véhicule terrestre à moteur est considéré victime de lui-même dès lors qu'il est le seul conducteur impliqué dans l'accident. C'est le cas par exemple lors d'une sortie de route qui donne lieu à un accident corporel ou de la collision avec un arbre ou un obstacle divers... Bien que le conducteur victime soit impliqué dans un accident de la route, le fait qu'il soit à la fois responsable et victime empêche l'application classique des règles de réparation en droit commun. Malgré la proportion considérable de victimes au volant, la loi dispose que : « L'obligation d'assurance ne s'applique pas à la réparation des dommages subis par la personne conduisant le véhicule » (article R. 211–8 C. assur.). Une évolution de la loi est d'ailleurs unanimement souhaitée pour remédier à cette situation.


À lire : Avocat pour accident de moto

Le cas où le conducteur est victime dans une collision avec un autre véhicule

La loi Badinter va s'appliquer en revanche ici dans la mesure où l'accident présente deux coauteurs impliqués. Le législateur distingue alors plusieurs situations :

Si la cause de la collision est indéterminée / inconnue

Dans cette hypothèse rare, il y a indemnisation réciproque intégrale dans le cadre de l'application exclusive de la loi Badinter concernant les véhicules impliqués.

Si la cause de la collision est inconnue mais que le conducteur victime n'est pas fautif

Dans cette hypothèse, le conducteur responsable, à travers son assurance, est en charge de la réparation. Cela est d'autant plus vrai qu'il ne peut en aucune façon s'exonérer en avançant que le comportement du véhicule de la victime relevait de « circonstances imprévisibles et irrésistibles » caractéristiques de la « force majeure ».

À lire : L'indemnisation de l'accident de la route non responsable

 

★ Recommander ce site à un ami ★

Si le conducteur victime a commis une faute

Nous touchons ici une différence essentielle, controversée, dans le traitement des victimes entre « conducteurs victimes » d'un côté et « piétons, passagers, cyclistes... » de l'autre.

Référons-nous une fois encore pour le comprendre à l'article 4 de la Loi Badinter du 5 juillet 1985 : « La faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis. » 

En d'autres termes, le conducteur fautif est moins protégé que ne le serait, par exemple, le piéton accidenté (indemnisé, lui, sans condition), dans la mesure où sa faute pourra justifier l'exclusion ou la minoration de son indemnisation.

Quelles fautes contreviendront à l'indemnisation complète des dommages corporels ?

La récente jurisprudence en la matière nous précise que cette exclusion ou minoration en raison de la faute du conducteur victime ne pourra se produire qu'à la condition que cette faute ait joué un rôle causal dans la survenance du sinistre. Tel serait le cas d'un excès de vitesse, par exemple, susceptible d'être un « ingrédient actif » possible de l'accident. En revanche, la conduite en l'absence de permis de conduire, l'état d'ébriété sont indiscutablement des fautes, mais des fautes qui ne jouent pas en-soi un rôle causal dans l'accident. Ainsi ne pourront-elles pas être invoquées systématiquement pour limiter le droit à réparation des dommages corporels de la victime conductrice.

En résumé : seules les fautes ayant concouru aux dommages sont susceptibles d'être retenues pour exclure ou réduire le droit à indemnisation.

Retenons qu'en pratique, le juge apprécie au cas par cas les situations et déterminera souverainement les responsabilités de chacun des protagonistes de l'accident.

Si le conducteur victime est entièrement responsable

Dans cette hypothèse, le conducteur victime ne peut prétendre à être indemnisé dans le cadre de la loi Badinter de 1985, dans la mesure où il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice. Soulignons néanmoins qu'il appartiendra au juge du fond d'apprécier souverainement si la faute du conducteur est d'une gravité telle qu'elle justifie une exclusion de toute indemnisation. En pratique, on constate que les juges du fond se montrent infiniment plus sévères à l'encontre des conducteurs fautifs qu'ils ne le sont vis-à-vis des piétons ou cyclistes ayant commis une faute inexcusable. Le droit à réparation des préjudices corporels peut ainsi être refusé au prétexte de fautes relativement courantes : distance de freinage insuffisante, franchissement d'un feu rouge...

À lire : Le rôle décisif de l'avocat en droit du dommage corporel.

Les dommages et intérêts limités du conducteur fautif

Désormais, c'est au juge du fond qu'il appartient souverainement de déterminer le pourcentage d'indemnisation qu'il convient d'accorder à la victime quand celle-ci a sa part de responsabilité dans l'accident. C'est donc au juge d'établir la gravité des fautes que la victime a commises, fautes qui ont joué un rôle causal, rappelons-le, dans la réalisation de ses dommages. Du pourcentage de responsabilité dépendra le pourcentage d'indemnisation.

Pour conclure : Retenons encore que ces dispositions relatives à la faute du conducteur victime demeurent valables quelles que soit l'âge du conducteur victime, quel que soit le type du véhicule conduit (voiture, moto, camion, quad, autres véhicules motorisés …) ; tous sont concernés par l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985.

UN AVIS GRATUIT ?

Je vous rappelle gratuitement Me contacter