L’expertise médicale est une épreuve pour la victime parce que cette dernière peut se trouver impressionnée par l’examen médical auquel elle va être confrontée. En effet, elle se trouve en position d’infériorité. Elle n’a pas nécessairement conscience des enjeux de l’expertise médicale, ni des de l’ensemble des éléments matériels qu’elle doit fournir. Elle ne sait pas non plus ce qu’elle doit lui dire ou ne pas lui dire.

Il n’est pas non plus inutile de rappeler que les conclusions d’une expertise médicale vont décider de l’avenir financier de la victime. On sait que certains dommages ont une influence directe sur les ressources présentes et futures de la victime. Voyons à présent, les conditions et les modalités d’une expertise médicale et comment il sera possible de l’optimiser à l’avantage de la victime d’accident.

 

 

COMMENT S’ORGANISE UNE EXPERTISE  MÉDICALE?

Quel que soit le type d’expertise, le processus pour la réalisation d’une expertise médicale est toujours le même. Il s’agira de convoquer toutes les parties liées directement ou indirectement à l’accident, d’indiquer à ces dernières dans quel cadre cette expertise intervient, de recueillir les doléances de la victime (ses observations et plaintes) tout en procédant à un rappel historique de l’accident. Il va s’agir aussi de procéder à l’examen clinique de la victime, de recueillir après cet examen les observations des parties (avocat, médecin conseil expert de la victime, assureur) et d’établir un pré-rapport ou un rapport définitif.

La convocation des parties

Bien que purement administrative, la convocation de toutes les parties en lien direct ou indirect avec l’accident est obligatoire sous peine de nullité de l’expertise et par conséquent des conclusions de l’expert. Il convient nécessairement de s’assurer que la convocation des parties est conforme aux dispositions réglementaires applicables à l’accident.

La mission

L’expert agit toujours selon un cadre préalablement défini. La mission de l’expert est déterminée suivant l’origine de l’accident, les circonstances de ce dernier. Par ailleurs, la victime aura affaire à différents experts en fonction du contexte : expert de la compagnie d’assurance, expert conseil de la victime, expert judiciaire…

Lorsque l’accident résulte d’un accident de la circulation (voiture, moto, vélo) l’expert que la victime rencontrera au préalable est l’expert de la compagnie d’assurance du conducteur responsable. Dans l’hypothèse d’un accord entre compagnies d’assurance, l’interlocuteur sera l’expert de la compagnie d’assurance de la victime. On rappellera qu’en matière d’accident de la route, la loi Badinter s’applique. Cette loi oblige la compagnie d’assurance à faire une proposition d’indemnisation suite aux conclusions de son expert.

ATTENTION : Bon nombre de victimes d’accident de la route ignorent que :

  • L’indemnisation de la compagnie d’assurance n’engage nullement la victime à l’accepter.
  • La victime peut se faire assister par un médecin de son choix lors de l’expertise médicale (article R211-43 du code des assurances).

Lorsque le dommage est la conséquence d’un accident de la vie, plusieurs hypothèses sont à envisager :

  • Soit l’accident est purement un accident domestique, c’est-à-dire qu’il survient dans les actes de la vie courante (ménage, jardinage, loisirs…). L’expert désigné est alors celui de la compagnie d’assurance de la victime si elle dispose d’un contrat « accident de la vie ».
  • Soit l’accident résulte d’une agression, d’un accident de sport pratiqué avec un professionnel, d’une catastrophe naturelle, d’un accident industriel, d’un attentat. Dans ces hypothèses l’expert pourra être celui de la compagnie d’assurance si le responsable est individualisé, sinon un expert judiciaire. Il faut savoir que pour ce type d’accident, il n’est pas rare de se trouver face à ses deux experts car l’accident peut être jugé suffisamment grave pour engendrer une responsabilité pénale, ou plus simplement parce que la proposition de la compagnie d’assurance s’avère totalement inadaptée au regard du handicap de la victime.

C’est donc le cadre dans lequel l’expert est désigné qui va définir la nature de la mission. L’expert ne peut nullement se prononcer en deçà ou au-delà de la mission qui lui incombe. En matière judiciaire seul l’avocat définit le contenu de la mission de l’expert.

Les doléances de la victime

Il s’agit pour l’expert et les parties de prendre connaissance des remarques de la victime depuis son accident. On vérifiera que ces doléances sont en lien direct, certain et exclusif avec l’accident. Ces doléances portent notamment sur les modifications vécues par la victime et ses proches dans les actes de la vie courante, les incidences professionnelles, la perte de revenus présents et ultérieurs.

En tout état de cause, quelle que soit l’expertise, les préjudices doivent être en lien direct, certain et exclusif avec l’accident.

L’examen clinique de la victime

Cet examen s’effectue en présence du médecin expert et du médecin conseil de la victime et tout autre médecin présent à l’expertise. A la moindre difficulté (litige ou mésentente entre praticiens…) l’expert chargé de l’expertise peut décider de réaliser seul l’examen clinique. Il doit dans cette hypothèse communiquer immédiatement ses conclusions verbales aux parties.

Les observations des parties

Ce n’est qu’après l’examen clinique que les parties (autres que la victime) présentes à l’expertise formulent leurs observations. Il s’agira pour l’avocat conseil de la victime de vérifier que la situation de son client a été correctement appréhendée. Il s’agira pour le médecin conseil de la victime d’insister ou de mettre en exergue une problématique médicale qui a pu être omise ou négligée. Cela souligne l’importance de la présence du médecin de recours en la circonstance.

L’ASSISTANCE D’UN AVOCAT ET D’UN MÉDECIN DE RECOURS

Pour l’avocat la vérification va s’attacher à vérifier que l’expert a pris en compte dans son analyse sur les points qui suivent :

  • Durée et nombre d’hospitalisations.
  • Type de soins et fréquence pendant l’hospitalisation.
  • Durée et type de rééducation.
  • Nombre et type de consultations externes.
  • Fréquence et distance des déplacements nécessités pour les soins, la rééducation, les consultations.
  • Type et nombre de soins paramédicaux (infirmiers, kinésithérapie, prothésiste, psychologue, psychiatre, orthophoniste, ergothérapeute).
  • Durée des arrêts de travail.
  • Présence et fréquence des différents types de tierces personnes.
  • Besoins de la victime en matière de réadaptation professionnelle ou de reclassement professionnel.
  • Perte de gains financiers professionnels.
  • Incidence de la perte de gains professionnels sur la retraite.

Pour le médecin conseil de la victime, la vérification portera principalement sur l’appréciation des déficits fonctionnels temporaires et permanents, sur les douleurs physiques et morales ressenties avant et après la consolidation médico-légale, et sur les possibilités d’aggravation de l’état de la victime.

La conclusion

La conclusion de l’expertise est le fruit d’un échange entre les parties. Les conclusions d’une expertise médicale sont rendues dans le cadre d’un rapport écrit. Ce rapport peut être contesté devant le juge :

  • Lorsqu’il s’agit d’une expertise entreprise dans le cadre d’un contrat d’assurance.
  • Au judiciaire, par une demande faite au juge d’une contre-expertise judiciaire.

On le comprendra facilement : Compte tenu des enjeux qu’elle recèle et de son incidence décisive sur l’avenir de la victime et de ses proches, l’expertise médicale est une étape qui doit être appréhendée avec la plus grande rigueur. Le recours à un avocat et à un médecin de recours demeure l’option la plus sûre pour limiter les risques d’une sous-évaluation des préjudices subis.